Pourquoi parle-t-on de « patient » pour désigner le client du médecin ?

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Le choix du mot « patient » pour désigner une personne qui consulte un médecin est l’objet de cet article exhaustif, où nous allons explorer les origines, les raisons et les implications de cette appellation.

La langue française est riche en nuances et subtilités, et la terminologie médicale ne fait pas exception à cette règle.

En effet, l’appellation « patient » est un terme qui en dit long sur la relation entre le médecin et son client, et sur la perception de la santé dans notre société.

Les origines du mot « patient »

Le terme « patient » provient du latin « patiens », lui-même dérivé du verbe « pati », qui signifie « souffrir », « endurer » ou « supporter ». Il est intéressant de noter que cette racine latine est à l’origine de nombreux autres mots français, tels que « patience », « passion » et « compassion ».

Le mot « patient » apparaît pour la première fois en français au XIIIe siècle, dans le contexte médical, pour désigner celui qui souffre d’une maladie ou qui est soigné par un médecin. Cette appellation s’est imposée au fil du temps et a supplanté d’autres termes qui étaient utilisés pour désigner les personnes malades, comme « malade » ou « infirme ».

  • Le latin : la racine du mot « patient » se trouve dans le verbe latin « pati », qui signifie « souffrir », « endurer » ou « supporter ».
  • Le français : le terme « patient » apparaît au XIIIe siècle et s’impose progressivement pour désigner celui qui souffre d’une maladie ou qui est soigné par un médecin.

Les raisons derrière le choix du mot « patient »

Plusieurs raisons expliquent pourquoi le mot « patient » a été choisi pour désigner le client du médecin. Certaines sont d’ordre historique, d’autres sont liées aux valeurs et aux représentations de la santé et de la maladie dans notre société.

  1. L’histoire de la médecine : à l’époque médiévale, la médecine était encore largement imprégnée de la pensée religieuse et de la croyance en la souffrance comme purificatrice. Appeler le malade un « patient » renforçait l’idée que la maladie était une épreuve à endurer, un passage obligé pour accéder à la guérison.
  2. La philosophie des soins : le choix du mot « patient » reflète une vision particulière de la relation médecin-malade, basée sur l’écoute, la compassion et le respect. Il suggère que le médecin doit être patient avec la personne qu’il soigne, et que cette dernière doit faire preuve de patience pour accepter son état, les traitements proposés et les éventuelles contraintes qu’ils impliquent.
  3. Les valeurs de la société : enfin, l’appellation « patient » traduit une certaine conception de la santé, où la maladie est perçue comme une fatalité, et où le malade est avant tout un être passif, contraint de subir les aléas de son état et les décisions des professionnels de santé. Cette vision peut être critiquée, notamment au regard de l’évolution des pratiques médicales et de l’importance croissante accordée à la responsabilité individuelle et au « pouvoir d’agir » des personnes malades.

Les implications du mot « patient » dans la relation médecin-malade

Le choix du mot « patient » pour désigner le client du médecin n’est pas anodin et soulève plusieurs questions et enjeux relatifs à la relation médecin-malade, à l’autonomie des individus et à la prise en charge de la santé.

D’une part, l’utilisation du terme « patient » peut contribuer à renforcer un rapport de pouvoir déséquilibré entre le médecin et la personne qu’il soigne. En effet, en mettant l’accent sur la souffrance et l’endurance, cette appellation tend à réduire le malade à un simple objet de soins, passif et dépendant du savoir et des compétences du professionnel de santé. Cette conception peut être problématique, car elle occulte le rôle actif que peut et doit jouer la personne malade dans la prise en charge de sa santé, notamment en matière de prévention, d’observance thérapeutique et d’adaptation à la maladie.

D’autre part, le terme « patient » soulève des questions éthiques et philosophiques sur la dignité, le respect de la personne et l’importance de l’écoute et de la communication dans la relation médecin-malade. En effet, derrière l’appellation « patient », se cache souvent une multitude de vécus, d’expériences et de besoins individuels, qui doivent être pris en compte pour offrir des soins adaptés et de qualité. Cette démarche nécessite une véritable attention aux singularités de chaque personne, et invite à repenser la médecine et la relation médecin-malade sur des bases plus humaines, empathiques et partenariales.

Le débat sur l’appellation « patient » : quelles alternatives ?

Face aux enjeux et aux problématiques soulevés par l’appellation « patient », certains auteurs et professionnels de santé plaident aujourd’hui pour une réflexion sur les termes utilisés pour désigner les personnes qui consultent un médecin, et pour la promotion d’alternatives plus respectueuses, inclusives et responsabilisantes.

  • « Usager » : ce terme fait référence à l’utilisation des services de santé par un individu et met l’accent sur son autonomie, sa liberté de choix et sa capacité à prendre des décisions éclairées concernant sa santé.
  • « Partenaire » : cette appellation invite à concevoir la relation médecin-malade comme une collaboration, où les deux parties sont impliquées de manière équilibrée et active dans la prise en charge de la santé et dans la recherche de solutions adaptées aux besoins et aux attentes de chacun.
  • « Personne soignée » : ce terme met en avant la dimension humaine et individuelle de chaque patient, en insistant sur le respect de sa dignité, de ses droits et de ses préférences dans le processus de soins.
  • « Client » : bien que controversé, ce terme peut être considéré comme une alternative au mot « patient », dans la mesure où il renvoie à une relation de service, où le médecin est perçu comme un prestataire et la personne soignée comme un consommateur, libre de choisir et d’évaluer les soins qui lui sont proposés.

Il est important de souligner que le débat sur l’appellation « patient » ne vise pas à nier la réalité de la souffrance et de la vulnérabilité des personnes malades, ni à minimiser l’importance du rôle du médecin dans la prise en charge de la santé. Il s’agit plutôt de questionner les représentations, les valeurs et les pratiques qui sous-tendent ce choix terminologique, afin de promouvoir une médecine plus éthique, respectueuse et adaptée aux enjeux et aux défis du XXIe siècle.

Le choix du mot « patient » pour désigner le client du médecin est un sujet complexe, qui renvoie à des enjeux historiques, culturels et relationnels. Derrière ce terme se cachent des représentations et des valeurs sur la santé, la maladie et la relation médecin-malade, qui méritent d’être questionnées et débattues. Le défi pour la médecine d’aujourd’hui et de demain est de trouver les mots et les pratiques qui permettront de concilier le respect de la souffrance, de la dignité et de l’autonomie des personnes malades, avec la nécessité d’une prise en charge adaptée, responsable et centrée sur l’humain.

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